yet, light, you are blind

loucka fiagan

les 8 et 9 avril à 20h00

une coprésentation beursschouwburg et la balsamine
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création performance

Représentation en anglais

les 11 et 12 décembre 2025 au Beursschouwburg

Pour Yet, Light, you are blind, Loucka Fiagan s’inspire du travail de Denise Ferreira da Silva, Fred Moten et des mots de Cheikh Ath : “… all the things unimaginable in the light may be possible in the dark” et présente une performance qui explore l’archétype de l’ombre, son influence sur l’identité individuelle et collective mais aussi son potentiel de réinvention. Un projet qui nous invite à résister à l’essentialisation de l’identité en mettant plutôt l’accent sur son irrémédiable fugitivité et en soulignant l’association entre ombre et identité noire.

Seul sur scène mais accompagné d’une équipe multidisciplinaire, Loucka Fiagan rassemble, recouvre des parcelles d’ombres et utilise tout à la fois les figures du clown, de la créature, du fantôme ou de l’enfant et convoque au plateau les pratiques du slam, du stand-up, du rap…

Une performance comme une succession de mutations de formes et de styles et qui donne à voir un corps et ses ombres dans un cycle continu de construction et de destruction sans que jamais une forme définitive ne puisse advenir.

note d'intention

 » Fort de mon expérience togolaise, j’envisage l’art comme une forme de soin, et l’artiste comme une figure se situant à la croisée de différents mondes, œuvrant sur des matières subtiles. Cette conception guide ma pratique artistique, où j’explore le potentiel thérapeutique en combinant mes études en sociologie et anthropologie, ma formation en psychologie comportementale, et mon intérêt profond pour la psychanalyse.

Je suis convaincu que les rituels animistes présents dans les régions togolaises, béninoises et dans la plupart des sociétés animistes remplissaient déjà cette fonction de soin. Ces rituels utilisent les mythes comme un langage de l’inconscient, basé sur la nature symbolique des choses. Les cérémonies servent alors de cadres collectifs pour ouvrir des espaces où des intensités, des forces et des pulsions instinctives partagées peuvent exister et s’exprimer librement, dans un cadre défini.

Il est important de souligner que, dans la vie quotidienne, nous nous interdisons généralement de laisser libre cours à nombreuses de ces impulsions, en grande partie parce qu’elles ne sont pas socialement acceptables.

Au niveau individuel, le refoulement constant de certaines impulsions peut, à terme, engendrer des formes de névrose et une dissociation avec la réalité.

Au niveau sociétal, de manière analogue, lorsque l’État s’efforce de contenir sur une longue période certaines intensités présentes dans la conscience collective d’une population, cela peut mener à des troubles psychiques à l’échelle de la société.

L’espace de la cérémonie offre la possibilité de mettre en scène des moments de nos histoires personnelles et collectives chargés de symbolismes. Une partie de notre cerveau ne faisant pas de distinction entre un événement vécu dans le présent et un souvenir du passé, il devient possible d’agir directement sur les connexions cérébrales. Cela ouvre la voie à la modification de certaines impressions liées à des expériences vécues durant notre enfance, qui ont fortement influencé la formation de notre personnalité adulte.

Mon approche artistique s’imprègne d’une vision Ouest-Africaine de l’art comme soin, s’appuyant sur les principes des rituels animistes pour explorer le potentiel thérapeutique de la performance. En créant des espaces où les impulsions peuvent s’exprimer symboliquement, je cherche à offrir des voies de guérison et de compréhension tant au niveau individuel que collectif, en s’appuyant sur les liens entre le corps, l’esprit et la mémoire.

 

La poésie, la musique et la mise en scène participent à cette action cérémonielle. L’aspect spectaculaire de cette approche est essentiel car il crée un espace temporaire où l’ouverture d’esprit et les idées critiques se rencontrent. De mon expérience togolaise, je vois l’art comme une sorte de soin, et l’artiste comme étant une personne qui se trouve à l’intersection entre des mondes, travaillant sur les matières subtiles.

 

Finalement, dans la lignée de la critique de « le social » par Fred Moten, je m’oppose aux constructions identitaires modernes qui créent de nouvelles formes d’essentialisation. Moten remet en question l’idée d’une « Noirté » fixe et connaissable, et met plutôt l’accent sur les qualités improvisatrices et insaisissables qui échappent à toute fixation. Si nos histoires culturelles ont été effacées, marchandisées et déformées, comment pouvons-nous reconquérir nos passés oubliés si nous continuons à nous identifier à des artefacts recyclés et à des représentations imposées ? Cette identification répétée menace précisément de renforcer les structures que nous voulons démanteler, nous piégeant ainsi dans un récit prescrit. »

Loucka Fiagan

biographie

« Mon nom est Loucka Fiagan, je suis artiste multidisciplinaire belge d’origine togolaise. J’ai obtenu un Master en art de la performance et chorégraphie de l’Institut Supérieur des Arts et Chorégraphies (ISAC). Mon implication dans la scène artistique belge a commencé tôt, notamment avec ma participation au collectif multidisciplinaire Chapter One. Par la suite, j’ai cofondé le collectif WDKY (wedontknowyet) avec l’artiste Ànima Cassamajor, un espace d’exploration des identités hybrides et de création de pièces immersives qui cherchent à briser les frontières entre public et interprète.

Mes collaborations sont un aspect important de ma pratique, et j’ai notamment travaillé de manière significative avec la chorégraphe renommée Moya Michael sur plusieurs volets de la série Coloured Swans ainsi que sur la création Outwalkers. En parallèle de mon travail performatif, je me suis également investi dans le sound design pour des productions théâtrales, collaborant avec des artistes tel·le que Castélie Yalombo, Eli Mathieu-Bustos et Lukah Katangila.

Sur le plan musical, je développe un projet solo sous le pseudonyme SVDU et suis également membre du groupe We In The Zoo, un projet de hip-hop alternatif influencé par le R&B, le trip-hop et le spoken word.

Ma résidence de deux ans au Beursschouwburg (2022-2024) a marqué une étape importante dans mon parcours, approfondissant mon approche artistique, qui se situe à la croisée de la musique, de la poésie et de la performance. »

Loucka Fiagan

distribution et crédits

Direction : Loucka Fiagan
Lumières et assistanat scénographie : Maureen Beguin
Composition : Luis Ramirez, Loucka Fiagan
Musique live : Luis Ramirez
Assistanat musique : Amina Osmano, Nyati Mayi
Costume : Delphine Somers
Conseillers en mouvement : Moya Michael, Awoulath Alougbin
Coach clown : Micha Goldberg
Spectatorship: Castélie Yalombo
Conseils dramaturgiques : Moya Michael, Désirée Cerocien, Simomo Boujarra
Partenaire structurel (Business, Communication & Production) : AnAku vzw
Coproduction : la Balsamine (Bruxelles, Be), Beursschouwburg (Bruxelles, Be)
Résidences : KAAP, KWP, KVS, Volta
Soutien artistique et partenaire de programmation : Viernulvier (Gent, be), les Halles de Schaerbeek (Bruxelles, Be)

Photo : © Nour Beetch